Chemin des mines
   Mines du pic Liena.

  I- SCHEMAS ET PHOTOS :

               

    SCHEMA des versants sud et est du pic Liena, montrant l'emplacement des mines Robert et Luisa, le long d'un filon occupant une faille qui parcourt le plateau de Liena (ou de Ruego), ce qui est aussi le cas des mines de Ruego. Il montre aussi la géologie du plateau, le tracé de la piste, et celui des vestiges du chemin des mines.

  
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PHOTO montrant l'un des lieux d'extraction du minerai faisant partie des mines "Robert", sous le pic Liena, sur son flanc sud.
   Ces mines (galeries, puits ou tranchées) sont pour la plupart alignées sur la zone de contact entre le grès rouge (au premier plan) et le granite (au deuxième plan), comme indiqué par le
SCHEMA ci-dessous.
   Cette zone de contact correspond à une faille le long de laquelle le compartiment sud s'est abaissé par rapport au compartiment
nord. C'est dans cette faille que s'est constitué le filon de minerai
  
   Au fond, la nappe de charriage avec, au milieu, le pic de Robiñera, sur lequel se détache la Punta d'Espluca Ruego (en calcaire dévonien jaunâtre) , et à droite le pic de La Munia.

 

 

 

 

 

  
    
    Une autre des tranchées faisant partie des mines Robert, entre granite à droite et grès rouge à gauche sur lequel se répandent les déblais (ou "haldes").
   Au fond, le massif du Mont-perdu à gauche, les deux bosses du pic Chinipro à droite.
   Contact entre le granite, à gauche, et l'éponte (la surface limitant un filon) du filon, à droite.


 
Autre PHOTO d'une tranchée des mines Robert, sur le plateau de Liena, creusée pour exploiter le filon occupant la faille mettant en contact le granite à gauche et le grès rouge à droite.
 
En haut et à gauche : le col (sans nom) entre le pic Liena à gauche, et le pic La Mota qu'on voit au centre de la photo.
     PHOTO ancienne, datant de 1924, de travaux à l'une des galeries des mines Robert (note 2).
  
Au fond : les Tres Marias.

 

            
    Schéma réalisé par M. Philippe Vivez (du "Centro de estudios del Sobrarbe" de Boltaña, grand connaisseur des mines de la région) où figure, à gauche, en coupe, les mines du pic Liena, avec ses galeries horizontales (dont une qui fait communiquer les versants sud et est) et les plans inclinés par lesquels on faisait descendre le minerai depuis la bouche des galeries jusqu'au plan inférieur d'où il partait vers la vallée. A droite figure le câble aérien par lequel il descendait aux installations minières de l'Hôpital de Parzan (l'"estacion Cerlig" étant la station d'angle, et l'"estacion Luisa" la station d'arrivée), et le départ de celui, transpyrénéen, par lequel il était transporté en France.


   VOIR AUSSI, au sujet des mines du pic Liena, et du plateau et de la sierra de Liena :
   -  une page consacrée à la
structure géologique de la sierra de Liena ;
   -  et les pages de photos suivantes :

  principalement : 
   
5-1 - Les mines de la région du cirque de Barrosa
    
5-5 - Les minerais

  
  mais aussi celles
concernant le plateau de Liena :
    3-1 - Le plateau de Liena
    3-2 -
Le promontoire et la cabane
    3-3 -
La sierra de Liena
    3-4 -
Le versant nord de la sierra
    3-5 -
Les éperons du versant nord de la sierra
 

  et les pages
:
    4-1 -
Le grès rouge
    5-4 -
Les mines Luisa
    5-2 -
Le câble aérien
    6-1 -
Les panneaux sigalant le "Camino de Las Pardas"
    6-2 -
Le chemin des mines sur le plateau
  


    II- FORMATION DES GISEMENTS METALLIFERES en général (c'est-à-dire des filons de minerai : on parle de "métallogénie").
  Elle peut être résumée (de façon simplifiée et non exhaustive, en raison de la complexité du sujet) de la manière suivante :

      
  1. Beaucoup de gîtes métallifères sont étroitement liés à des PLUTONS GRANITIQUES HERCYNIENS.
   Les plutons granitiques sont ces grosses masses de granite (dimensions de l'ordre de la dizaine de km) qui sont issues d'une fusion partielle (à 600-700°), dans les profondeurs de la chaîne de montagne hercynienne (formée par collision de deux continents vers -320 à -300 million d'années : voir les pages consacrées à la formation des Pyrénées), fusion partielle affectant soit des sédiments (imbibés d'eau, qui abaisse la température de fusion) portés par le continent en subduction sous l'autre, soit de la partie profonde de la croûte du continent restée en surface, réchauffée par la montée (déclenchée par la subduction) de matériel chaud dans l'asthénosphère (voir la figure ci-dessous).
   La masse de magma issue de cette fusion, moins dense que les roches environnantes ("encaissantes"), monte très lentement dans la croûte (sous l'effet de la poussée d'Archimède, comme une bulle d'huile dans de l'eau) et de ce fait se refroidit et cristallise. Cette cristallisation est complète bien avant que la masse de magma atteigne la surface. Le pluton ne finit par affleurer qu'à la faveur de l'érosion de l'épaisseur de croûte qui la recouvrait alors, et des sédiments déposés entre temps. Sa montée entraine une décompression responsable de fissures disposées en pelures d'oignon qui vont être le siège de circulation hydrothermales.
   Les masses de granite qui affleurent en Europe occidentale (dont ils ont fait la richesse industrielle par l'intermédiaire de ces gisements) correspondent le plus souvent à de tels plutons hercyniens mis en place entre -320 et -290 Ma. C'est le cas en France des granites de la Bretagne, du Massif Central, et de la chaîne axiale primaire des Pyrénées, en particulier des massifs de l'Aneto et du Néouvielle, et de la masse de granite (dit "granite de Bielsa") dans laquelle a été creusé l'étage inférieur du cirque de Barrosa.
               
             SCHEMA visant à expliquer la formation des gisements métallifères liés aux plutons granitiques de l'ancienne chaîne hercynienne.

   Au cours de la cristallisation les minéraux les plus réfractaires, c'est-à-dire ceux qui cristallisent les premiers, ont le plus souvent un poids spécifique plus élevé que celui du magma et ont de ce fait tendance à sombrer au fond de la masse magmatique encore fluide et à s'y déposer. Ainsi se sont formés par exemple les grands gisements de fer de Suède.
   Vers la fin de la cristallisation du pluton les cristaux constituants habituels du granite (quartz, feldspath, mica), qui se forment dans sa périphérie à partir de magma résiduel riche en bore, phosphore, lithium, sont énormes (on parle de "pegmatites"), et associés à des cristaux inhabituels, recherchés par les minéralogistes : tourmaline, béryl, topaze, etc..
   Après la fin de la cristallisation, persistent, toujours à la périphérie du pluton, des poches d'eau à haute température (de l'ordre de 500°, ce qui donne à l'eau un fort pouvoir de dissolution) dans lesquelles sont dissous en grande quantité des ions métalliques qui n'ont pas trouvé place dans les cristaux du granite. Cette solution aqueuse, sous l'effet d'une pression élevée, monte dans les fissures ou failles qui parcourent le pluton et le terrain encaissant. Lors de cette "circulation hydrothermale" ascendante, l'eau, s'éloignant du pluton et se rapprochant de la surface, se refroidit et perd son pouvoir de dissolution. Les ions métalliques précipitent et se concentrent (souvent sous forme de sulfures, de carbonates ou d'oxydes) dans les fissures. C'est ainsi que se constituent, à plus ou moins grande distance au-dessus des plutons granitiques, en auréole, les gisements (ou filons) métallifères hydrothermaux qui affleurent en surface des millions d'années plus tard, quand l'érosion a fait disparaître les roches qui les surmontent. Ils intéressent alors les industriels quand la concentration des métaux est suffisante dans la roche stérile (la gangue) qui les contient.
   Peuvent aussi exister des filons pneumatolytiques où des métaux ont été mis en place par des fluides gazeux à très haute température.
   La nature des métaux qui précipitenr dépend de la température. Dans la zone où la température est tombée entre 200 et 300°, ce sont des minerais comme la pyrite d'abord, puis la galène, et la blende (sulfures de fer, de plomb, et de zinc) qui s'accumulent. Cela a été le cas dans la région du cirque de Barrosa (mines du pic Liena, de Mallo Ruego, du pic Mener et de La Géla).
   
    Dans ce qui restait de l'ancienne chaîne hercynienne la circulation hydrothermale a pu ailleurs créer des gisements métallifères sans lien avec les plutons. En effet, entre le entre le Trias et le Crétacé supérieur, des extensions de la croûte ont provoqué un amincissement de celle-ci, impliquant des failles (qui ont par ailleurs favorisé un volcanisme) et des affaissements : réchauffée par la proximité de l'asthénosphère, de l'eau qui imprégnait les roches et avait dissous en profondeur des métaux, est monté dans les failles et, une fois refroidie, les a déposés à proximité de la surface. A noter que dans ces bassins ont pu aussi se déposer des sédiments, et des végétaux (la végétation, dans un milieu alors tropical et humide, y était luxuriante) à l'origine du charbon qu'on trouve par exemple dans le sillon houiller qui traverse du nord au sud le Massif Central, lequel est riche également en gisements métallifères, notamment de galène et de chalcopyrite (sulfure de fer et de cuivre).
   
    La partie supérieure des gisements peut être altérée par l'infiltration dans le sol des eaux superficielles riches en O2 et CO2 : c'est ainsi par exemple que la galène peut se transformer en cérusite (carbonate de fer, CO3Fe), et la pyrite en hydroxyde de fer (limonite notamment : on parle de "chapeau oxydé" ou de "chapeau de fer")

   2. Des gîtes métallifères peuvent aussi se former DANS D'AUTRES ENVIRONNEMENTS ROCHEUX :
      
     - ROCHES VOLCANIQUES :
    Des bulles de gaz contenues dans une coulée de lave peuvent former des cavités qui restent prisonnières de la roche. L'eau chargée de minéraux qui circule dans celle-ci, provenant de la surface encore chaude, dépose là où la roche est plus froide, sur la paroi de ces bulles, des cristaux de quartz ou d'améthyste : ainsi se forment les géodes recherchées par les amateurs de minéraux.
   A proximité des exhalaisons gazeuses qui s'échappent des fissures d'un volcan (les fumerolles) on trouve une série de minéraux formés par sublimation (passage direct de l'état gazeux à l'état solide), en particulier du soufre natif.
   Dans la croûte océanique proche d'une dorsale des fissures permettent une circulation hydrothermale : de l'eau de mer, infiltrée et réchauffée en profondeur où elle dissout des ions métalliques, remonte et retourne à l'océan (par des "fumeurs noirs") où ces divers ions métalliques précipitent sous forme de sulfures ou d'oxydes sur le plancher océanique où ils se mélangent à des sédiments. De ce mécanisme volcano-sédimentaire sous-marin relèvent les nombreux gisements polymétalliques (dépôts datant du Dévonien ou du Carbonifère) de la vaste "Ceinture pyriteuse sud-ibérique" s'étendant du sud-Portugal à la région de Murcie en passant par l'Andalousie. Des morceaux de croûte océanique égarés sur un continent ("ophiolites") peuvent aussi porter de tels gisements polymétalliques, notamment de cuivre (c'est le cas sur l'île de Chypre, qui a donné son nom à ce métal).
      
     - ROCHES SEDIMENTAIRES (grès, argile, calcaire) :
   Leur formation (on parle de "diagénèse") se fait par compaction de sédiments. L'eau expulsée emporte les ions métalliques ou les particules de minerai qu'ils peuvent contenir, et les déposent ailleurs, où ils se concentrent. Ces dépôts, en couches stratifiées (on parle de "gisements sédimentaires stratiformes"), se font surtout dans des endroits où la vitesse de l'eau est réduite, le long de rivières ou de rivages de bassins peu profonds.
   Par exemple dans les calcaires l'eau qui circule dans les nombreuses fissures de la roche peut être chargée d'oxydes de fer après avoir érodé des filons voisins qui en contiennent. Le fer peut alors, à certains endroits, se substituer
à la calcite et constituer de tels gisements stratiformes (note 1). Toujours dans les calcaires on peut trouver du fer sous forme de concrétions ferrugineuses dans des argiles rouges dérivant d'anciens sols de type latérite.
   Cependant 80% des réserves mondiales en fer sont constituées par du "fer rubané". Il s'agit d'un dépôt où alternent des couches de quelques cm d'épaisseur, rouges et verdâtres,
de silice et d'oxydes de fer (magnétite et hématite). Ce dépôt s'est formé il y a 2 milliards d'années : le fer arraché par l'érosion aux roches continentales, soluble dans les eaux de ruissellement dépourvues, alors, d'oxygène, a précipité et s'est déposé dans la mer, où de l'oxygène, produit par l'activité de bactéries semblables aux cyanobactéries actuelles, l'a transformé en oxydes de fer insolubles.

   Les grains de quartz libérés par l'altération des roches granitiques sous l'action de l'eau produisent le sable des rivières, des lacs et des océans. Certains minéraux insolubles et denses, se comportant comme les grains de sable, peuvent s'y concentrer : c'est le cas de l'or des rivières.
   Au-dessus des nappes phréatiques l'eau venant de la surface, riche en O2 et CO2, et ayant, en circulant dans la zone sus-jacente (dite d'"oxydation"), oxydé les sulfures en sulfates, ceux-ci vont réagir avec les sulfures dissous dans l'eau de la zone dite de cémentation (celle qui est juste au-dessus de la nappe, où l'eau imbibe la roche en permanence), de sorte que, par exemple, sous l'effet de sulfates d'argent, la pyrite (sulfure de fer) va se transformer en sulfure d'argent qui, lui, précipite et se concentre. Des gisements de cuivre peuvent aussi se former de cette façon.
   En zone tropicale humide l'altération des roches granitiques, intense, aboutit à la formation d'hydroxydes de fer, de nickel, ou d'aluminium qui précipitent, et les autres produits de l'altération étant léssivés, se concentrent : ainsi se forment les gisements de bauxite (aluminium) et de latérite fossile (fer, ou nickel comme en Nouvelle-Calédonie).
   Dans les pays chauds l'évaporation intense de lacs salés ou de lagunes entraîne le dépots d'évaporites, tels le chlorure de sodium (sel) ou le sulfate hydraté de calcium (gypse).
  
    
     - ROCHES METAMORPHIQUES, issues de la transformation des roches précédentes sous l'effet de la pression et de la température.
      

   
   III- EXPLOITATION DES MINES :
    
Dans les galeries l'abattage du minerai se faisait en forant dans la roche, à l'aide de barres à mine (ou fleurets), des trous dans lesquels on bourrait un explosif, de la poudre noire (dite "poudre de mine"). Dans le passé, avant l'utilisation de la poudre, on fragilisait la roche en la chauffant grâce à un feu allumé contre la paroi, ou dans une sorte de brasero, puis on la refroidissait, si possible avec de l'eau.
      Pour frapper sur les barres à mine on a d'abord utilisé une masse ou une massette. Mais à partir de 1922 les mines de Parzan ont été équipées de compresseurs pneumatiques, permettant de remplacer la perforation manuelle par la perforation pneumatique, ce qui a été un gros progrès, faisant passer la progression dans les galeries de 5 ou10 mètres par mois à 60 mètres, moyennant un aiguisage à la forge de plus de 100 barres à mine par jour le plus souvent, car les barres à mine s'usaient rapidement.
      Dans les mines Robert et les mines Luisa (qui communiquaient par une galerie) les galeries étaient étayées par des pièces de bois provenant de la forêt de la haute vallée du rio Barrosa, entre le cirque et l'Hôpital de Parzan.

                                   Planche de l'Encyclopédie de Diderot et d'Alembert. >

      Leur ventilation se faisait de façon naturelle,
et l'écoulement des eaux vers l'extérieur (exhaure) était facilité par le creusement de rigoles (voir la page où il est question de l'étymologie du mot Ruego).
      Le transport du minerai dans les galeries était assuré par des
bennes que des hommes et des animaux faisaient rouler sur des rails.
Entre la sortie des galeries des mines Luisa et la station supérieure du câble aérien le transport du minerai était assuré par des plans inclinés.
      En raison de l'altitude des mines (2100 à 2500 m.) leur exploitation ne pouvait se faire que du mois de mars ou avril au mois d'octobre ou novembre, selon les conditions météorologiques, en moyenne 6 mois par an. Sa reprise au printemps nécessitait des travaux importants : il fallait libérer de la neige les chemins d'accés et les installations (cables aériens, lignes electriques).
      La production variait beaucoup d'une année à l'autre, de 6000 à 13000 tonnes environ de minerai pour les mines du pic Liena (en comptant celle de la mine Ana).

                         
  
Dans les mines Robert :
   - à gauche
: galerie de roulage
   
- à droite : puits d'accès à une galerie supérieure.
 
   (L'auteur du site remercie M. Louis de Pazzis, géologue, membre et co-animateur de sorties au sein de
Géolval, association de vulgarisation de la géologie des Pyrénées, de lui avoir communiqué ces photos, ainsi que celle, ci-dessus, du contact granite-éponte, prise par lui dans les mines Luisa à la mi-juillet 2009).
     

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   NOTES :
  
1. C'est ainsi que des mines de fer ont pu être exploitées en plein causse, comme par exemple dans l'Aveyron, à Mondalazac, dans le Causse Comtal, où les oxydes de fer proviendraient de filons, qui en sont riches, associés à la faille du Kaymar, quelques kms au nord-ouest (voir le site de Jean Rudelle, consacré à ces mines).

  2. Photo extraite d'un article de Romero Ortiz de Villacian (José), "Los filones de galena de Bielsa y Parzan", paru dans le "Boletin oficial de Minas y metalurgia", año XIII, n° 150, Madrid, novembre 1929.
      

 

  Page mise à jour le 23 février 2018